INTERVIEW Le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde se donne deux ans pour bâtir une force politique nouvelle, « progressiste ». 

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Les sénatoriales ont marqué une victoire des  Républicains et de l’UDI, et un coup d’arrêt pour la République en marche. La recomposition politique est-elle terminée ?
Les sénatoriales ont été un très beau succès pour l’UDI. Nous tournons ainsi la page d’une « annus horribilis », subie parce que nous n’avons pas eu la force collective de présenter un candidat à la présidentielle. Et nous avons été contraints de soutenir un candidat et un programme que nous n’avions pas choisis et qui nous a embarqué dans une affaire qui ne nous concernait en rien. Nous en tirons les leçons. La recomposition politique en cours nous rend désormais libres de toute entrave et de toute alliance. Libres de toutes nos positions, que ce soit vis-à-vis du gouvernement ou de toute formation politique.
L’alliance traditionnelle avec les Républicains est-elle caduque ?
Elle n’est plus une obligation. A partir de l’UDI, je souhaite que nous construisions une force politique nouvelle, rassemblant le centre et la droite progressiste. D’ici aux européennes, nous avons deux ans pour gagner une autonomie complète et rassembler ceux qui ne partagent pas la dérive d’une droite se recroquevillant sur sa fraction la plus nationaliste, conservatrice, et frileuse. Bref, la droite qui a refusé de voter Macron contre Le Pen, n’est pas la nôtre.
Cette grande formation progressiste, beaucoup en parlent, mais on ne voit toujours rien venir…
J’espère que les gens issus des Républicains qui ne partagent pas cette dérive droitière  sauront créer leur force politique. Je suis prêt à la fédérer avec la nôtre. S’ils ne le font pas, il nous reviendra d’incarner ces français du centre et de la droite progressiste. Car dans cet espace politique, l’UDI est la seule force politique organisée, présente au Parlement  et dans chaque territoire. Je crois que les différents courants politiques doivent devenir cohérents. L’UMP, est morte à force de vouloir tout enfermer dans le même parti –de la droite extrême jusqu’à ce qu’ils prétendaient être le centre . En vérité, ils ne sont plus d’accord sur rien. S’ils en ont le courage, je suis prêt à travailler avec des gens comme Valérie Pécresse, Xavier Bertrand, ou Christian Estrosi pour construire une force politique cohérente et constructive. Mais il y a désormais une frontière entre nous et ceux qui ont refusé de voter Macron contre Le Pen !
Que représente M. WAUQUIEZ pour vous ?
La ligne Buisson, celle de tous les excès, de tous les échecs.
Excluez-vous de travailler demain avec Laurent Wauquiez ?
Je vous l’ai dit : nous sommes désormais libres de toute alliance. Ce que je veux construire à partir de l’UDI, c’est une force politique qui ne sera plus jamais supplétive des Républicains. Cette page avec LR est tournée. Mais je refuse tout autant d’être le laudateur zélé du pouvoir !
Emmanuel Macron pourrait avoir besoin de l’UDI pour sa réforme constitutionnelle. Que lui dites-vous ?
Des débuts de Macron, il y a du bon et du moins bon. Je voterai la réforme du travail. Le ministre de l’Education est un homme exceptionnel, dont je soutiens le projet. Je partage quasi à 100% ce que dit M. Macron sur l’Europe. Depuis une génération, c’est le discours le plus volontariste d’un Chef d’Etat français sur la construction européenne. Mais si M. Macron a raison dans ce qu’il dit, il est hélas minoritaire dans notre pays sur l’Europe. Et je dis au Président, vous avez besoin d’alliés pour convaincre les Français. Nous sommes prêts à travailler avec lui sur l’Europe, le droit du travail, l’éducation ou sur les réformes institutionnelles pour moderniser la France. Mais jamais je ne renoncerai à la liberté de dire quand nous ne sommes pas d’accord.
Que pensez-vous des choix budgétaires du gouvernement ?
J’ai des désaccords mais c’est le budget le plus sérieux que j’ai vu depuis 15 ans. Pour autant, je combats la hausse de la CSG qui est aussi injuste socialement qu’économiquement inefficace . De même, j’alerte sur le logement. La baisse des APL avec une baisse forcée des loyers pour les HLM est une erreur grave. Pour économiser 1,3 milliard d’euros, on aboutira à l’arrêt de la construction, de la rénovation urbaine et des programmes d’entretien, comme le changement d’un ascenseur par exemple. Je dis à Edouard Philippe : alerte rouge ! Je lui dis chaque euro de loyer en moins pour le locataire doit être aussi un euro de charge en moins aussi pour son organisme HLM. Enfin, sur l’ISF, si je partage l’idée de favoriser l’investissement dans les entreprises, et donc l’emploi, le fait qu’un appartement soit taxé et pas un lingot d’or me choque. Ce budget a besoin de plus d’équité, nous la proposerons.