Érosion, recul du trait de côte, submersion marine… se battre contre la mer ?

Pascal Demarthe, Maire d’Abbeville, Président de la Communauté d’agglomération de la Baie de Somme, Conseiller régional des Hauts-de-France et co-président de la fédération de la Somme

 

Selon un rapport de la Cour des comptes, plus de 20 % des côtes françaises seraient en recul. Si ce phénomène n’est pas nouveau, il a tendance à s’accélérer avec le changement climatique et nous impose de revoir notre façon d’appréhender cette problématique majeure. Sur la zone littorale Normandie/Hauts-de-France et plus particulièrement sur mon territoire de la Somme, le recul moyen du trait de côte varie de 0,5 à 1,5 mètre par an ! Les conséquences pour les habitats en front de mer, les activités économiques, mais aussi parfois pour certaines voies de circulation peuvent donc être désastreuses.

Nous parvenons à ralentir le processus par diverses techniques, telles que le rechargement régulier en galets à Cayeux-sur-Mer, dans ma Communauté d’agglomération de la Baie de Somme, l’installation de pieux en bois, ou encore par la mise en place de systèmes de drainage sous la plage (écoplage). Il s’agit là d’une gestion coûteuse qui n’est possible que grâce à un engagement financier très fort des collectivités locales.

Nous disposons également de digues, mais celles-ci sont vieillissantes et seront-elles suffisantes pour affronter les prévisions d’élévation du niveau de la mer ? Rien n’est moins sûr. La gestion du trait de côte fait donc face à deux problématiques :

  • L’érosion : exposition à la houle, aux vents et aux courants,
  • La submersion marine : conséquence du changement climatique et du vieillissement des ouvrages en place.

Si l’État est engagé aux côtés des collectivités dans ce combat face à la mer, il est à noter que la gestion du trait de côte ne bénéficie de l’accompagnement de l’État (via notamment le fonds « Barnier ») que lorsqu’un risque d’inondation (d’habitations) est identifié (logique de submersion marine). Dans le cas contraire, une réflexion est en cours au sein du Comité national du trait de côte en vue de faire émerger un modèle de financement pour accompagner la recomposition spatiale des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte.

Le recul maîtrisé et la relocalisation semblent ainsi constituer le socle du nouveau paradigme de l’État en matière de gestion du trait de côte. Une logique extrêmement complexe à mettre en œuvre sur le terrain, pour nous élus locaux, et qui ne peut s’inscrire que sur le long terme. Elle recouvre des questions aussi variées que l’acquisition de parcelles de terrain, le relogement, la protection des habitats naturels des espèces protégées, la limitation de l’urbanisme, la prévention des risques naturels, etc.

Nous devrons donc répondre, rapidement et sur le long terme, à de nombreux enjeux majeurs pour affronter ce grand défi du XXIe siècle !